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Entretien entre le SNADEOS CFTC et M. VILLARD Directeur Général de la Cnav

18 juil. 2025

Participants :

  • M. Renaud Villard, Directeur de la CNAV

  • Mme Virginie Charles-Bray Directrice Avenir Responsable et Carrières Dirigeantes (ARCAD)

  • Benoît Volkoff, Président du SNADEOS CFTC

  • Léonard Guillemot, Secrétaire général du SNADEOS CFTC

  • Anne Haugmard, Trésorière du SNADEOS CFTC

  • Sylvain Finck, Chef de file Retraite à la Fédération CFTC PSE


1. Nouvelle classification et politique de rémunération 2025


Le SNADEOS CFTC :

La transposition de la nouvelle classification dans la Branche vieillesse soulève de nombreuses interrogations : quels emplois sont considérés comme repères, et sur quels critères ? Pourquoi certains postes, comme ceux de conseiller retraite, n’ont-ils pas été mécaniquement reclassés en 4B ? La RMPP à 1,5 % suffit-elle à absorber ces évolutions ? Quelles sont les orientations retenues pour la politique de rémunération 2025, en particulier sur les dispositifs de parcours, les promotions internes et les possibilités de rachat de RTT ?


M. Villard, Directeur de la CNAV

M. Villard assume une ligne mesurée : la CNAV a fait le choix d’une application prudente de la nouvelle classification, en restant fidèle aux orientations nationales. Les emplois repères ont été repris de manière relativement mécanique, mais la caisse nationale a souhaité ménager des marges de progression.


« Il fallait éviter de brûler toutes les étapes d’un coup. Si on passe tout le monde au dernier étage de la fusée dès maintenant, que reste-t-il pour les parcours de demain ? »


Cette stratégie, défendue devant le conseil de réseau, vise à maintenir un levier managérial à moyen terme.

Le cas emblématique des conseillers retraite illustre ce choix : leur bascule en 4B était envisageable, mais a été écartée pour ne pas priver les caisses de la possibilité d’accompagner les évolutions par des parcours valorisants.


« Le niveau 4 est le cœur de meule. Si on généralise le 4B, on perd la capacité d’en faire une reconnaissance de parcours. On aurait pu tout passer en 4B, et ça n’aurait rien coûté. Mais j’ai voulu garder une troisième marche, pour qu’il y ait encore du mouvement. Car le parcours devient un outil structurant de la politique salariale. »


Concernant les managers, la CNAV a promu une homogénéité de traitement, en veillant à éviter les disparités locales. « Il y a encore quelques cas isolés, mais on a poussé pour une approche collective et cohérente. » Une péréquation est envisagée à l’occasion de la phase 3 de la classification pour soutenir les caisses les plus contraintes financièrement. Elle permettra de financer les qualifications dans les caisses où le budget est trop juste.


Sur la politique salariale 2025, M. Villard confirme que les dispositifs de parcours seront de plus en plus sollicités. Il assume un usage plus large des « promotions au mérite » et une mobilisation renforcée de la règle des 105%.


« Le levier ‘parcours’ va devenir structurant pour accompagner la montée en compétences. »

Enfin, sur les rachats de RTT, il précise :

« C’est du ressort local. Chaque directeur fixe ses priorités. Vous pouvez racheter ce que vous pouvez payer, je ne donne pas de doctrine. »

Chaque caisse fait en fonction de sa politique salariale et notamment en arbitrant entre le recours à des CDD ou des rachats de RTT pour les salariés


2. Aidants familiaux : une priorité sociale et managériale


Le SNADEOS CFTC


Le SNADEOS et la Fédération CFTC PSE souhaitent alerter sur la montée en puissance de la problématique des salariés aidants, en lien avec les négociations annoncées à l’UCANSS pour septembre prochain. Dans un contexte de vieillissement de la population et d’allongement de la durée de vie, un salarié sur quatre pourrait bientôt être concerné. Le SNADEOS plaide pour une politique sociale ambitieuse, applicable à tous les statuts, y compris aux agents de direction.

Plusieurs pistes sont évoquées :

  • L’aménagement du temps de travail pour les aidants,

  • La création d’un compte épargne-temps dédié,

  • Un télétravail adapté à ces situations,

  • Des mesures spécifiques pour l’adaptation des fins de carrière.

 

Le SNADEOS souligne que la situation des agents de direction est particulière : l’intensité des responsabilités rend leur articulation vie pro/vie perso plus délicate encore. Il ne s’agit pas d’obtenir des droits « en plus », mais d’assurer une égalité d’accès aux dispositifs. 

 

M. Villard, Directeur de la CNAV


D’emblée M. Villard reconnaît l’ampleur du phénomène. Selon lui, ce sujet est appelé à prendre une place croissante dans les politiques RH de la CNAV. Il insiste sur la nécessité d’un cadre élargi et structuré, mais progressif.

« C’est un phénomène que l’on rencontre en action sociale vieillesse : souvent, les aidants meurent avant la personne qu’ils aident. C’est une réalité que je connais bien. On s’use à aider. Le problème, c’est qu’on n’identifie pas bien les aidants. C’est encore une réalité invisible. Le fait de passer voir sa mère de temps en temps, ce n’est pas être aidant. En revanche, certains salariés sont véritablement dans des parcours d’usure silencieuse. »


Il se montre favorable à un élargissement du protocole actuel, au-delà des cas de proches en situation de perte d’autonomie, pour intégrer les maladies longues ou les enfants porteurs de handicaps. Mais il insiste sur la rigueur des critères, pour préserver l’équité.


Au sujet des agents de direction, il se montre très direct :

« Un ADD en temps partiel à 80 %, c’est possible. Il a aussi une vie. Il faut arrêter avec cette vision sacrificielle du poste ou l’ADD est forcément à 120% et se reconnecte le soir s’il est parti à 18h. On peut être engagé sans être consumé. »


Il évoque des initiatives déjà mises en place à la CNAV et dans quelques caisses locales telles que les « cafés des aidants », les groupes de parole, les journées de sensibilisation. Mais tout cela reste ponctuel.

« Il faut aller plus loin. La CNAV a un devoir d’exemplarité. »


Interrogé sur les pistes concrètes (compte épargne-temps, télétravail spécifique, aménagements, compte épargne temps aidants ), il répond :

« Il faut laisser de la marge de manœuvre aux directeurs, mais avec un cadrage national. Une négociation UCANSS bien menée peut poser ce cadre. »

 

Monsieur Villard insiste sur la nécessité d’accorder aux salariés aidants une souplesse dans leur aménagement de temps de travail.

La prise en compte de la situation des salariés aidants notamment pour les ADD et managers passe par la programmation sur des plages horaires compatibles avec leur situation.

 

 3. Risques psychosociaux et alerte managériale


Le SNADEOS CFTC


Le SNADEOS partage les résultats préoccupants de sa dernière « grande consultation » de 2024 : plus de 40 % des agents de direction déclarent avoir été confrontés à une situation de management toxique. Ce constat alerte sur la réalité des risques psychosociaux (RPS) au sein de la branche vieillesse. Le SNADEOS interroge la CNAV sur sa politique de prévention, les outils d’évaluation existants (Octomine) la prise en compte des RPS dans le DUERP, ainsi que sur les retours d’expérience issus du réseau.

Le SNADEOS demande également que soit explicitement reconnue la charge psychosociale spécifique des managers, notamment lorsqu’ils sont confrontés à une tension entre injonctions institutionnelles et difficultés de terrain. Il suggère une feuille de route pluriannuelle sur ces enjeux, en incluant les agents de direction dans la stratégie nationale de prévention.


M. Villard, Directeur de la CNAV


M. Villard ne minimise pas la gravité du sujet. Il reconnaît que les managers eux-mêmes peuvent être exposés à des situations de tension extrême, d’autant plus lorsqu’ils ne disposent pas de relais ou de soutien organisationnel.

« Un manager toxique, c’est une moitié d’équipe qui démissionne, et l’autre moitié qui est cramée. »


Il évoque l’importance de déconstruire certains stéréotypes, notamment celui de l’agent de direction infaillible, disponible à toute heure, déconnecté de ses propres limites.

« Le cliché de l’agent de direction, c’est le super Warrior qui est au bureau à 7 h même le dimanche matin. Mais derrière le costume, il y a un être humain, avec une vie, des fragilités, et parfois des blessures. »


Il insiste également sur les logiques de présentéisme encore très présentes dans certaines cultures d’établissement.

« Si je croise un agent de direction à 18h qui rentre chez lui, je ne vais pas penser qu’il est moins engagé. Il faut déconstruire cette idée absurde selon laquelle partir tôt est un signe de faiblesse. »


Sur les outils d’analyse, il défend l’utilité de l’outil digital de baromètre social OCTOMINE mais appelle à une lecture fine des résultats.

« Un score moyen peut cacher des déséquilibres internes profonds. C’est souvent dans les détails que se lit la réalité. »


Enfin, il reconnaît que certains opérateurs locaux sont encore frileux sur les congés ou dispositifs spécifiques, et que cette prudence budgétaire ne doit pas servir d’alibi pour éluder les besoins réels des personnels.

« Ce n’est pas parce qu’on parle d’équilibre budgétaire qu’on doit faire l’impasse sur l’équilibre psychologique des équipes. »


Le Directeur Général de la CNAV considère important de rappeler aux managers les caractéristiques du management recherchant une performance durable. Dans ce but un cycle de formation des managers de la branche retraite sur la performance durable sera lancé pour les sensibiliser aux enjeux et concilier la recherche de résultats d’efficience avec une performance tenant compte de l’humain.


Par ailleurs, la CNAV dispose sur ce sujet d’une offre d’accompagnement pour le réseau avec notamment des échanges avec chaque Directeur pour un traitement sur mesure des situations.


4. Budgets, FNGA et tensions sur les emplois


Le SNADEOS CFTC


Dans un contexte de retour à une activité dite « normale » après la réforme et la pandémie, les caisses sont confrontées à un paradoxe : d’un côté, une sous-exécution persistante des emplois (ETP) ; de l’autre, des besoins croissants de traitement, notamment sur les stocks de liquidation. Le SNADEOS interroge donc la CNAV sur l’utilisation de ces marges budgétaires : quelle stratégie est mise en œuvre pour combler les écarts d’emplois réalisés ? Comment sont arbitrées les marges du FNGA ? Quelles mesures pour renforcer l’attractivité des métiers – notamment auprès des jeunes générations – et limiter les départs précoces après quelques années de service ?


M. Villard, Directeur de la CNAV


Avec franchise, M. Villard dresse le constat d’un changement de génération. Là où les parcours étaient autrefois linéaires, les nouveaux arrivants cherchent davantage de mobilité, de diversité, et parfois quittent la Sécurité sociale dès les premières années. Il ne s’agit pas d’un problème uniquement budgétaire, mais d’un enjeu culturel :

« La Sécu a retrouvé un fonctionnement normal en termes de turn over … mais les jeunes, eux, ne restent plus. Ils ne sont plus sensibles à la stabilité comme avant.  Il faut adapter nos structures à des attentes nouvelles, plus mobiles, plus individualisées. »

Sur la sous-exécution des ETP, il indique que celle-ci est « maîtrisée » : les caisses ne sont pas en situation de blocage, mais les écarts d’emploi révèlent des tensions persistantes sur certains métiers, notamment ceux à forte expertise (contrôle de gestion, gestionnaire paye, en informatique le marché du travail est désormais un peu moins tendu, etc.).

 

« On a du mal à recruter dans certaines zones géographiques, ou sur des fonctions à haute technicité. Et quand on recrute, parfois, on perd vite les talents parce qu’ils n’adhèrent pas à nos logiques internes. »


Monsieur VILLARD évoque les difficultés pour fidéliser au-delà de 3 ans de jeunes recrutés de moins de 30 ans. Le turn over reste encore élevé sur cette tranche d’âge et nécessite de réfléchir à une révision de la politique de formation initiale qui peut prendre 13 mois pour former un jeune technicien.


Concernant le FNGA (fonds national de gestion administrative), il précise que ses marges permettent d’opérer des rééquilibrages entre caisses. Un effort est fait pour accompagner les plus contraintes, en particulier celles confrontées à des tensions locales (immobilier, coûts de recrutement, turn-over).


Sur l’utilisation des moyens non consommés, il évoque plusieurs leviers :

  • des renforts ponctuels de CDD dans les caisses en difficulté,

  • le soutien à la formation et à la montée en compétences,

  • et, plus largement, le financement d’actions d’amélioration continue.


« On ne peut pas piloter uniquement par les chiffres. Il faut donner envie de rester. Et ça, ça passe par des collectifs de travail solides, des parcours lisibles, et un management qui fait sens. »


5. FNAS et rapport HCFEA : vers une transformation du périmètre CNAV ?

Le SNADEOS CFTC


Le rapport conjoint du Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS), du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) et du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) propose une réforme de grande ampleur : transférer la gestion des GIR 1 à 4 des départements vers la CNAV. Pour le SNADEOS, cette recommandation interroge profondément le périmètre historique de la branche vieillesse. Le syndicat souhaite connaître la position de la CNAV sur ce transfert, son analyse sur les impacts potentiels, et son niveau d’anticipation dans la prochaine COG.

Par ailleurs, le SNADEOS s’enquiert de l’état d’exécution du Fonds national d’action sanitaire et sociale (FNAS), des équilibres entre caisses, et du soutien apporté aux politiques d’action sociale en direction des publics les plus fragiles.


M. Villard, Directeur de la CNAV


M. Villard ne cache pas la portée systémique de la proposition. Pour lui, l’enjeu n’est pas simplement opérationnel ou financier : il est identitaire. Accueillir les GIR 1 à 4 reviendrait à faire franchir à la CNAV un seuil qualitatif inédit, en l’installant à l’interface du médico-social et du social.

« Ce que dit le rapport, ce n’est pas de déplacer trois dossiers. C’est de changer la nature même de notre maison. Notre culture, c’est celle de l’industrialisation, du traitement à grande échelle, de l’optimisation. Le champ de l’aide aux personnes, lui, repose sur de la relation humaine fine, sur du lien, du sens, parfois du non-mesurable. Il ne faut pas sous-estimer ce choc culturel. »


Il ajoute que la CNAV est prête à envisager cette évolution, à condition qu’elle soit construite dans une logique de trajectoire, d’expérimentation et de moyens adaptés. A priori 500 ETP supplémentaires permettraient à la CNAV de prendre en charge la mission de gestion financière de l’APA mais avec au préalable une investissement et développement informatique conséquent ce qui laisse à penser que le projet ne peut s’envisager que sur une période de deux à trois ans.

« On ne peut pas absorber ces missions sans faire évoluer nos outils, nos équipes, nos référentiels. »


À ses yeux, la prochaine COG pourrait constituer un cadre pertinent pour aborder cette perspective, mais à condition d’être accompagnée d’un travail en profondeur avec les les acteurs notamment, les départements et la CNSA.


Sur le FNASSPA, M. Villard défend une vision d’équité territoriale. Il rappelle que le fonds permet de corriger des inégalités locales, mais que sa gouvernance reste très encadrée. Les priorités d’action sociale sont fixées autour de trois axes :

  • prévention de la perte d’autonomie,

  • accompagnement des retraités modestes,

  • soutien aux situations complexes.


« Le FNASSPA est une chance. Mais c’est un outil à manier avec discernement, pour faire du sur-mesure social dans un univers de plus en plus normé. »


6. Liquidation des retraites, stocks de dossiers et complexité croissante


Le SNADEOS CFTC


Le SNADEOS s’inquiète de l’évolution du stock de dossiers en instance dans les caisses de retraite, en particulier des situations complexes (carrières longues, polypensionnés, carrières mixtes ou internationales). Il interroge également la CNAV sur la part des liquidations provisoires, sur les délais moyens de traitement, ainsi que sur la politique de rendez-vous et d’accompagnement des assurés. Enfin, il attire l’attention sur les effets collatéraux des réformes : hausse du volume, difficultés de recrutement, mobilisation importante des agents sans stabilisation durable.


M. Villard, Directeur de la CNAV


M. Villard ne nie pas les tensions mais les replace dans une dynamique de résorption maîtrisée. Selon lui, le stock était monté à 250 000 dossiers dans les mois suivant la réforme des retraites. Grâce à l’effort collectif du réseau, il est redescendu sous les 200 000. L’objectif est désormais fixé à 170 000 pour fin 2025, un volume qu’il juge soutenable au regard de la capacité de traitement actuelle.

« Le stock, c’est notre colonne vertébrale. Il ne s’agit pas de jouer avec. Mon objectif est clair : repasser sous les 170 000 dossiers d’ici la fin de l’année. Et on va y arriver. »

« Les liquidations provisoires, c’est entre 10 à 20 % des dossiers. Mais il faut bien comprendre que dans 90 % des cas, il n’y a pas de variation financière. Et dans ceux où il y en a, c’est souvent à l’avantage du retraité et ne concerne que quelques euros. »


Il rappelle que la réforme dite « Borne » a généré un afflux important de demandes, sans que toutes les caisses aient pu recruter à la hauteur de leurs plafonds autorisés. Certaines ont bénéficié de surnuméraires de façon temporaire, mais toutes n’ont pas réussi à saturer leur plafond ETP, faute de vivier suffisant.


« On a poussé les caisses à recruter, mais dans certains territoires, on ne trouve tout simplement pas. Les métiers sont de plus en plus techniques, et les candidats qualifiés ne restent pas toujours. »


Sur les carrières mixtes, internationales ou incomplètes, il concède que le traitement est toujours plus chronophage. Il évoque notamment la difficulté à fiabiliser les données NIR ou à récupérer des informations précises auprès des régimes étrangers. Mais il plaide pour une approche pragmatique :

« Ce n’est pas parce qu’un dossier est complexe qu’on doit le mettre en stand-by. Il faut outiller les agents, leur donner le temps, et surtout reconnaître l’expertise qu’ils mobilisent. »


Il soutient également l’idée d’un renforcement du maillage en rendez-vous :

« Ce qui compte, c’est la qualité de la relation. Même s’il y a un délai, si la personne est informée, accompagnée, écoutée, ça change tout. »


Enfin, il insiste sur un point souvent oublié : la fierté du service rendu.

« Ce sont des agents de la branche retraite qui permettent à des millions de personnes de partir à la retraite dans de bonnes conditions. Il faut leur rendre hommage. »


7. Lutte contre la fraude : entre fantasmes et réalités


Le SNADEOS CFTC :


Alors que la lutte contre la fraude sociale fait régulièrement l’objet de débats publics intenses, le SNADEOS interroge la CNAV sur les outils réellement déployés dans la branche vieillesse, sur l’ampleur mesurée du phénomène, et sur la stratégie retenue pour sécuriser les prestations versées, notamment à l’étranger. Le syndicat s’inquiète aussi d’un certain déséquilibre médiatique : les fraudes spectaculaires captent l’attention, mais masquent souvent la réalité quotidienne du travail de sécurisation accompli par les agents.

 

M. Villard, Directeur de la CNAV


Avec une pointe d’ironie, M. Villard démonte les stéréotypes véhiculés dans le débat public. Il rappelle que si des cas de fraude à l’existence peuvent effectivement exister dans certains pays (par exemple des pensions versées en raison de la non déclaration du décès par les proches), ils restent très marginaux au regard de l’ensemble des flux. La CNAV collabore avec l’INSEE, les postes consulaires, et des opérateurs spécialisés pour fiabiliser les données.

« On ne fait pas du blindage à la hache, mais de la microchirurgie des données. »

« La fraude, ce n’est pas un grand complot de morts vivants à l’étranger. C’est souvent plus banal, plus diffus, mais tout aussi dommageable. »


Il évoque un travail méthodique engagé avec les équipes CNAV autour d’un échantillon aléatoire de 5 000 dossiers, analysés en profondeur pour détecter les anomalies. Résultat : environ 50 millions d’euros de fraude identifiée.

« Ce n’est pas négligeable. Mais ce n’est pas non plus un gouffre. Il faut remettre les chiffres dans leur contexte. »

M. Villard insiste sur l’importance de parler aussi de la faute, souvent liée à une mauvaise compréhension des droits. Il appelle à ne pas stigmatiser les assurés mais à renforcer l’information, la transparence et la qualité du service.

« La fraude est parfois systémique, parfois accidentelle, parfois individuelle. Notre mission, c’est d’agir à tous les niveaux. »

La CNAV est aussi en lien étroit avec l’URSSAF Caisse Nationale, dans l’identification et la gestion des employeurs fraudeurs.

 

8. Paritarisme, gouvernance et pilotage de la COG


Le SNADEOS CFTC


Le SNADEOS regrette que les organisations syndicales soient peu associées à la préparation de la Convention d’Objectifs et de Gestion (COG), en particulier sur les aspects relatifs aux ressources humaines. Le syndicat rappelle que le paritarisme était mieux respecté lorsque les directeurs étaient désignés par les conseils d’administration. Il interroge M. Villard sur sa vision du rôle des partenaires sociaux dans la gouvernance nationale et locale, et sur la manière dont les parlementaires pourraient être davantage impliqués dans les décisions structurantes.


M. Villard, Directeur de la CNAV


M. Villard assume une position nuancée. Il reconnaît que les organisations syndicales représentatives sont déjà associées aux échanges, mais qu’elles n’ont pas de rôle direct dans l’élaboration politique de la COG. Pour lui, ce cloisonnement n’est pas un désaveu, mais un effet de la gouvernance actuelle : « Ce n’est pas moi qui fixe les règles du jeu. »

« Le paritarisme de gestion, ça n’existe pas. Ce qui existe, c’est un paritarisme de vision, de pilotage stratégique. La gestion, elle, relève du métier. »

Concernant les parlementaires, il insiste sur la nécessité de préserver le caractère pluriannuel de la COG dans un environnement marqué par l’annualité budgétaire au niveau de l’Etat. Pour lui, la COG doit rester un instrument stratégique, distinct de la simple exécution des lois de financement de la sécurité sociale. Il craint qu’un empiètement parlementaire mal coordonné ne provoque des discordances.


Enfin, sur le principe d’un retour à une nomination des directeurs par les conseils d’administration, il se montre sceptique :

« Un directeur ne doit pas être la marionnette d’un conseil. Il doit pouvoir exercer en responsabilité, avec des marges d’autonomie et une redevabilité équilibrée. Sinon, on recrée un jeu de pouvoirs locaux potentiellement paralysant. »


Mais il conclut sur une ouverture :

« En revanche, sur la définition des risques, sur la vision du service public, là, oui, les partenaires sociaux ont toute leur place. C’est d’ailleurs ce que fait la branche maladie en soumettant le rapport Charges et Produits au vote de son conseil. Ce serait une bonne piste à explorer pour nous aussi. »

 

 

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