Le PLFSS 2024 dans son article 27 dispose que les indemnités journalières, après décision d'un médecin contrôleur mandaté par l'employeur, pourraient être suspendues automatiquement, si l'arrêt lui paraît injustifié.
Lors de la présentation de la PLFSS 2024 à la commission des comptes le 29 septembre et à la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale le 2 octobre, la CFTC avait indiqué sa franche hostilité au projet. Malgré la navette parlementaire, le projet du gouvernement est resté dans le texte.
Le gouvernement cherche à maîtriser l’augmentation des dépenses d’arrêt de travail laissant croire qu’elles ont pour seule origine le soi-disant « abus des patients et des médecins » …
La CFTC affirme que l’augmentation des dépenses d’arrêt de travail provient de plusieurs facteurs :
L’augmentation des rémunérations portée par la progression des salaires et l’indexation du SMIC sur l’inflation expliquent le montant à la hausse des indemnités journalières.
Le niveau élevé de la population active et le faible taux de chômage se traduisent mécaniquement par une progression du nombre d’avis d’arrêt de travail.
Le recul de l’âge de départ à la retraite place une partie de la population malade anciennement retraitée en situation d’actif.
L’absence de politique de prévention dans les domaines de la santé mentale et sociale dans les entreprises et la prise en charge médiocre des maladies mentales en France ne permettent pas d’endiguer les arrêts de travail associés.
L’insuffisance, voire l’absence de médecins traitants prive les citoyens du suivi régulier et d’une prise en charge rapide de leurs besoins de santé, facteur aggravant de leur état général.
Aussi, la CFTC réaffirme son hostilité au projet. La « chasse » aux abus et aux fraudes doit bien entendu être poursuivie dans le cadre des actions menées par l’assurance maladie, mais ils ne sont pas les causes essentielles de la progression des arrêts de travail. L’impartialité des décisions du contrôle médical est remise en cause par l’article 27.
Un salarié, arrêté après l’avis de son médecin traitant, pourrait voir sa prescription contestée par un médecin contrôleur payé par son employeur après un examen médical de quelques minutes.
La décision du médecin contrôleur payé par l’employeur est-elle objective ?
La nature même du lien contractuel entre l’employeur et lui fait peser une suspicion de partialité consciente ou non de ses décisions.
Le salarié serait donc pénalisé par l’arrêt du paiement automatique de ses indemnités journalières. Il serait en outre victime de deux avis médicaux contradictoires, l’un lui demandant de reprendre le travail, l’autre lui indiquant que le repos doit être respecté.
Que décidera-t-il ?
Il est probable qu’il reprendra le travail pour ne pas se retrouver en situation financière précaire.
Si le salarié choisit de contester la décision du médecin contrôleur mandaté par son employeur, il doit effectuer une réclamation au sujet de la décision prise automatiquement par l’assurance maladie.
Il devra ensuite demander à bénéficier d’un examen de sa situation en Commission de Recours Amiable (CRA). En cas de refus de la CRA, il lui restera la possibilité de faire un recours contentieux devant le tribunal judiciaire.
Le rôle de médiateur objectif qu’incarnait le contrôle médical de l’Assurance Maladie est lui aussi contesté par l’article 27 du PLFSS 2024. La CFTC réaffirme que le contrôle des arrêts de travail doit être du strict ressort de l’Assurance Maladie qui doit en rester le garant.
Des services médicaux déjà en grande difficulté !
L’article 27 du PLFSS 2024 fait peser un risque d’embolie administrative dans les services tant les réclamations et saisines de la CRA risquent de se développer de manière exponentielle.
Administrativement, la CFTC qualifie cette mesure de risquée, en ce qu’elle est source d’insécurité juridique, qu’elle risque d’être dévoyée et surtout qu’elle remet en cause le principe de neutralité au fondement de notre système de sécurité sociale.
Les services médicaux des caisses déjà en difficulté du fait du manque de personnels médicaux et administratifs, de recrutements difficiles, devront faire face à des nouvelles missions chronophages liées aux contentieux des assurés et médecins traitants même si des délégations de tâches plus larges sont prévues aux personnels et personnels médicaux (ce qui viendra encore aggraver les charges de travail des personnels de DRSM).
La CFTC s’oppose donc à l’article 27 de la PLFSS 2024, disposition injuste, inopérante, stigmatisante et embolisante pour les services de l’Assurance Maladie.
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